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Jacques Cartyeah
2 août 2012

Et c'est reparti pour un tour !!!

Loin de l'idée initiale de reprendre ce blog dans un sens chronologique depuis les dernières actualités (qui datent d'il y a deux mois...), "place à l'actualité", comme on peut l'entendre à longueur de bulletin d'infos sur BFM TV.

Je ne sais pas l'écho qu'a eu cette nouvelle en France, mais ça y est, ce qui se sentait depuis plusieurs semaines a été officialisé ce matin : Jean Charest, premier ministre du Québec, a dissous le parlement provincial (qui siège à Québec) en vue des élections législatives anticipées qui auront lieu le 4 septembre prochain.

C'était dans pas mal de bouches, ce qui est étonnant pour un pays aussi peu virulent au niveau de la politique que le Québec. Attention, je n'ai pas dit désintéressé, mais la politique étant souvent source de conflits, et le québécois préférant éviter les querelles, la question est assez peu abordée. Bien sûr, l'actualité depuis le début de l'année met un peu à mal ce genre de comportements, mais si on compare avec un autre pays, au hasard, la France, je pense que ce genre d'actualité déclencherait quelques dizaines de meurtres par strangulation dans chaque bar abordant le sujet, c'est à dire... tous les bars.

 

Mais revenons à nos moutons québécois. Sortant de mon job à 22 heures (j'y reviendrai dans un post à venir), j'enfourche ma Harley Davidson (comprendre : mon VTT rouillé acheté à l'arrache dans un garage à l'honnêteté plus que douteuse), et entame les 20 minutes d'efforts de cuisseaux qui me séparent de mon logis. Chemin faisant, mon attention se porte sur un hélicoptère survolant le quartier du centre ville. Et, flash back, me revient en tête la discussion avec ma coloc, quelques heures auparavant, portant sur la "parade" (manifestation, vous l'aurez compris) prévue ce soir dans les rues de Montréal.

Je décide de suivre les gyrophares, me laissant guider jusqu'à la troupe de manifestants, et me fonds dans le groupe. Comme constaté lors des manifestations précédemment vues, l'ambiance est légère, les sourires sont de sortie, mais les pancartes et les slogans aussi. C'est bigarré ce soir : je prends quelques temps pour me faire dépasser et prendre ainsi la température du mouvement. En marge des protestations Charest et sa loi 78 "Poutine" (cf. article précédent), on trouve aussi des protestations corollaires, comme des "ni dieu, ni maitre, ni état, ni patron, AUTOGESTION !!", des masques d'Anonymous, des "police partout, justice nulle part"... Bref, le mouvement et ses revendications se sont élargis, et même si la décision de Charest a été le déclencheur de la manifestation, le refus de la hausse ne semble plus être le seul leitmotiv des manifestations. Rappelons par ailleurs que le mouvement des casseroles était déjà un élargissement du mouvement étudiant, puisqu'il concernait surtout la loi 78, et concernait toute la population québécoise.

 

Toujours est-il que je me laisse entrainer, et me balade dans la foule. Passée l'atmosphère générale toujours aussi saine qui se dégage du mouvement, bien loin de l'agressivité qu'on peut trouver ailleurs, quelques signes de durcissement de ton se font sentir. Des masques, sweats à capuche refermée et t-shirts cachant le visage jusqu'aux yeux me font comprendre que je ne suis plus dans la section familiale de la parade (j'ai croisé des poussettes au début de ma marche !!), mais bien dans la section dure, et quelques attitudes, échanges de messages rapides, courses rapides et tenues vestimentaires font penser aux black blocs entrevus dans les manifestations du G20 il y a 3 ans à Strasbourg.

Impression confirmée quelques minutes plus tard, alors que nous sommes au bas de la rue McGill College, déjà croisée tout à l'heure, et ou nous avons raillé la superficialité d'un festival de mode (podium, musique techno branchouille et petits fours au menu ... Une autre ambiance !!). Quelques fusées de feux d'artifices provoquent des cris de joie, et font lever les yeux quelques secondes. "C'est chouette, même le devant de la manifestation - car c'est maintenant là que je me trouve - est sain d'ambiance" peut-on se laisser penser, en regardant la lune qui éclaire notre parcours. Pas longtemps.

 

Un gros mouvement de retour juste devant moi me fait redescendre sur Terre. Pas mal de monde se barre en courant. Une bonne moitié, dirons-nous. N'entendant pas de cris, je décide d'aller voir plus en avant la raison de cette subite débandade. Nous sommes à 20 mètres d'une colonne de policiers, et quelque chose dans leur attitude me dit qu'ils ne sont pas là pour sanctionner un ticket de parcmètre oublié. Bingo : quelques-uns s'affairent autour d'une bande d'effrontés qui leur a visiblement balancé des caillasses "drette dans le casque" pour parler local.

Le mouvement s'est arrêté. Les deux groupes se toisent, se jaugent. Les manifestants sifflent, crient, tapent sur les casseroles - elles sont toujours là, et resteront je pense le symbole de ce mouvement -, mais n'avancent plus. Les policiers sont en rangs. Je commence à me questionner intérieurement sur l'intérêt de ma présence, étrangement.

Puis vient la charge, ordonnée, des policiers. A part quelques hardis, vite maîtrisés, nous reculons, avec un mot d'ordre général "On reste caaaalmes, on reste groupéééés !!!". Oui, les québécois ont appris les ficelles pour réduire au minimum les interpellations, mais restent respectueux. Pour ma part, ma curiosité étant satisfaite d'une part, souhaitant rentrer sans tenter le diable d'autre part, sachant que je ne suis jamais allé aussi loin dans une manif française, et voyant un policier commencer à perdre son calme à 5 mètres de moi d'une troisième part, je retourne à mon fidèle destrier. Sans encombres.

 

Mais le ton est donné. La rentrée (qui a lieu le 16 août ici) promet d'être chaude. Ceux qui pensaient que le mouvement s'est essouflé en sont pour leurs frais. Ca va chier, et pas à peu près.

Mention spéciale pour le comportement général des manifestations. Nous sommes passés plusieurs fois devant des banques, des magasins de luxe, et malgré quelques relants anticapitalistes, pas une fleur piétinée, pas un rétro pété, pas un lampadaire de pété. Les québécois se soulèvent, mais avec la manière. Bravo à eux, mais les temps à venir ne semblent pas serein.

"On va bien voir".

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Commentaires
Jacques Cartyeah
  • Après y avoir réfléchi pendant plusieurs années, me voilà rendu en terre québecoise pour de bon !! Lecteur, voici mon devoir de mémoire pour cette année à venir. Ou peut-être plus... "On va bien voir"
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